Sud Education Jussieu

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Réforme des formations supérieures

RECHERCHE ET FORMATION NE SONT PAS DES MARCHANDISES !

 

L’Université se trouve aujourd’hui dans un état désastreux : l’augmentation massive des effectifs s’est accompagnée d’un désengagement de l’Etat en matière d’encadrement et d’équipement. La crise est là, aiguisant les contradictions entre deux options pour l’enseignement supérieur, appelé :

- soit à répondre mécaniquement aux besoins du marché (formation professionnalisante, acritique et normative) ;

- soit à mettre en avant l’éducation par la confrontation des disciplines et la recherche (formation ouverte et critique).

Claude Allègre et son projet visent à développer le côté " marchand " et " adapté " au détriment des activités ouvertes. Nous pensons que l’Université doit très exactement faire le contraire.

Depuis la parution du rapport Attali, le ministère ne cesse de brouiller les cartes :

- Claude Allègre déclare qu'il n'est pas engagé par le texte, mais ses réseaux poussent à sa mise en place anticipée ;

- des responsables ministériels lancent des pétards - suppression de(s ?) DEA dès la rentrée 99, concentration des écoles doctorales -, puis sont remplacés sans autre explication.

Parallèlement au malaise provoqué par les projets de décrets mettant en cause le fonctionnement du CNRS, au projet de loi sur l’innovation et la recherche, la situation se détériore à l'Université. Après les actions des étudiants de plusieurs universités dénonçant la logique de privatisation du service public, le texte " Harmonisation européenne, document d'orientation " diffusé le 18 décembre n'apporte pas les réponses attendues.

Ce document distingue deux grands cursus :

Le cursus amenant à la licence (bac + 3)

Tous les diplômes actuels (DEUG, DUT, DEUST, BTS et licence) sont maintenus. La semestrialisation, avec compensation et capitalisation, devient générale. Une nouvelle licence professionnelle avec stage long, ouverte aux titulaires de DUT, DEUST, BTS et DEUG, donnera accès à des poursuites d'études et aux concours de catégorie A (IUFM, administration).

En application de conventions avec les universités, les élèves de prépas pourront accéder aux DEUG, et ceux en première année de grandes écoles, à la licence.

Les cursus post-licence

La maîtrise sera une année de différenciation " sans sélection ", soit vers une filière professionnalisante courte (bac + 5), soit vers la voie longue conduisant au doctorat. La voie courte, maîtrise suivie d'un DESS, est sanctionnée par le " mastaire ", la voie longue se déroule dans le cadre des écoles doctorales englobant les DEA.

Les IUP pourraient être décalés d'un an et délivrer licence et mastaire. Sous conditions, les étudiants des préparations aux concours (agrégations et autres), ceux engagés dans un DEA, ceux validant des acquis professionnels pourraient aussi obtenir un mastaire ; les filières grandes écoles pourraient aussi être sanctionnées par un mastaire.

Ces dispositions s'appliqueront sur la base du volontariat, dans le cadre des contrats d'établissement, à partir de la rentrée 99.

Contrairement à sa présentation rassurante (et hypocrite), ce projet directement inspiré du rapport Attali vise à une transformation radicale de l'enseignement supérieur :

- La référence devient la professionnalisation, donc le lien avec l'industrie, tandis que l'apprentissage disciplinaire, donc le lien à la recherche, n'est plus affiché. Il s'agit d'un changement de nature de l'université, mettant en avant l'acquisition de compétences professionnelles et non l'autonomie dans l'apprentissage de savoirs liés à la recherche, avec la formation à la critique que cela comporte.

- La coexistence des nouveaux diplômes avec ceux existants, du fait de l'allongement des études et du maintien des conditions limitatives d'accès actuelles, se traduira par une aggravation des sélections, et porte en germe le dépérissement des diplômes nationaux existants.

- La licence professionnelle n'offrira aucune possibilité d'acquérir les connaissances générales nécessaires aux poursuites d'études réclamées par les étudiants de ces filières courtes : les passerelles seront virtuelles. La maîtrise, année d'orientation, sera le lieu des coexistences impossibles entre plusieurs formations de fait incompatibles : ce qui revient à pousser les universités à constituer des filières calquées sur les différents mastaires, et donc à descendre à la sortie de la licence les numérus clausus des DESS, DEA, préparations aux concours et autres formations professionnalisées.

- Tout devient possible pour les étudiants des filières grandes écoles, auquel le projet offre les grades universitaires qui leur faisait défaut, en particulier vis à vis des autres formations européennes, et cela sans aucune contrepartie.

- L'hétérogénéïté des mastaires et leur mise en place au gré des contrats d'établissements ouvrent la voie à la définition de contenus locaux, professionnalisés, véritable sollicitation pour leur contrôle par des intérêts privés et régionaux. On doit craindre une totale parcellisation des formations, transformant le service public en une mosaïque de diplômes, opaque pour les étudiants non soutenus par un environnement social privilégié.

Deux menaces se conjuguent dans ce projet : la balkanisation des filières (et donc leur vulnérabilité aux intérêts privés) et la fin de l'université comme lieu d'enseignement lié à la recherche. Dans ces deux aspects, la possibilité pour les étudiants d'acquérir la maîtrise d'une discipline régresse, avec l’illusion entretenue que la professionnalisation serait créatrice d’emplois : c’est globalement faux. Cette substitution d'une formation scientifique par une acquisition de compétences professionnelles, signifie pour nous la mise en cause fondamentale du service public de formation supérieure. Il est révélateur que parallèlement par les biais des contrats Etat - Régions, au travers du plan U3M, le ministère vise à la construction de pôles universitaires où la règle sera l'inégalité des formations.

Les étudiants de Rennes, de Toulouse le Mirail, de Paris I, … ont eu raison de s'opposer à ces projets que le ministère n'a fait connaître que sous leur pression et qu'il tente de faire passer durant la grande trêve qui relie les congés de Noël à la première session d'examen, en tentant de les faire approuver par un CNESER restreint le 25 janvier.

Les déclarations " affectueuses " du ministre envers la république, le service public et la laïcité, le rapprochement suspect entre Allègre et les états-majors syndicaux, inquiètent : personnels et étudiants doivent faire encore plus valoir leurs points de vue.

Nous vous invitons en conséquence à une

Assemblée Générale des Personnels

Enseignants-chercheurs, chercheurs, IATOS

Jeudi 14 janvier 99, 12 h 30, Amphi 32

Nous souhaitons la présence de tous les étudiants et collègues intéressés par les projets en cours, quelque soit leur appartenance (ou non appartenance) syndicale.

Le 11 janvier 99




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