Recherche d'un nouveau marché : le marché de la nouvelle recherche


Depuis plus de 20 ans, la marchandisation vampirise toutes les activités humaines qui lui étaient encore interdites. Avant hier, elle a happé les services publics de télécommunication, la gestion de l’eau. Hier, elle a annexé une bonne partie des cotisations sociales (retraites) et les activités artistiques (intermittents). Aujourd'hui, elle essaie de s'offrir la recherche, l'éducation. Demain, l'air et les génomes se transmuteront en marchandises... et toutes les formes de la solidarité humaine seront converties en produits.
Comment garantir que les individus et leurs institutions ne résistent pas à cette marchandisation du monde ? C'est très simple, il suffit de les atomiser en "individualisant" leur relation avec le "système". L'avantage pour le marché de cette individualisation est la perte du sens collectif des individus et de leurs institutions, et un sentiment d'impuissance absolue contre ce "système du marché" qui apparaît alors comme inéluctable et terriblement "efficace".

Dans la recherche et l'enseignement supérieur, cette stratégie se concrétise par l'atomisation:

Dans la recherche …

Il s'agit de l’application à la recherche d’une offensive générale contre le service public.
Voir ci-contre (total des crédits de paiement et après annulations) et plus loin.
Mais il s’agit aussi de l’autoritarisme du ministère et de transferts au privé :
- Développement des fonds incitatifs, directement pilotés par l'administration : le fonds pour la recherche technologique (boosté en son temps par Allègre), le fonds national pour la science (créé par Allègre) et le nouveau fonds pour les priorités de la recherche : total des CP, 412M€, en hausse de 84%.
- Conversion de 300 allocations de recherche en contrats CIFRE (les thésards sont affectés à des entreprises privées), tandis que la moitié des thésards reste sans financement.
- Financement du plan innovation, soutien des entreprises innovantes, financement des incubateurs. Intéressement financier des chercheurs.
-  Soutien au mécénat, aux fondations.
- Spectaculaire croissance du crédit impôt recherche au bénéfice des entreprises qui font de la recherche : + 440 M€ en 2004, à 1,1 Milliard d'euros.


Cette situation se répercute directement sur l'activité des labos. Elle est à l'origine des premières manifestations, puis de l'appel "Sauvons la recherche" issu d'un collectif de directeurs d'unité qui mettent leur démission en jeu, signé aujourd'hui par près de 57 000 personnels de la recherche, et soutenu citoyennement par plus de 93 000 personnes. Elle s’est traduite par d’importantes manifestations le 29 janvier et le 2 février.
Ces actions répondent aussi à l'autre volet de la politique ministérielle, la gestion des emplois :
- arrêt des créations d’emplois d’enseignants-chercheurs, d’ITA, de chercheurs, rares créations de postes d’IATOS (compensant les pertes dues au repyramidage des emplois),
- mais plus encore transformation de 550 emplois titulaires d'ITA et de chercheurs en supports pour le recrutement de chercheurs contractuels sur 3 à 5 ans.

Il y a donc 3 volets à la politique ministérielle : l’asphyxie de la recherche publique des EPST et des universités, le renforcement du pilotage par le ministère, le transfert massif des crédits de la recherche publique au bénéfice des entreprises privées.
Il y a bien eu sur les postes et les budgets un virage politique en 2002, mais autoritarisme et transferts au privé constituent des orientations anciennes, fortement mises en avant par les ministres précédents (loi sur l’innovation, incubateurs, “ la recherche c’est fait pour gagner de l’argent ”), dont la présence lors de la manifestation du 29 janvier nous a choqué.

Dans le même esprit, l’unanimisme dans la défense des EPST et le silence sur les universités  d’accueil des laboratoires et sur les fonctions -souvent universitaires – de leurs directeurs  gênent sur deux plans :

Face aux nouveaux chercheurs CDD, nous pensons que le mouvement actuel doit déboucher sur un engagement solennel à refuser les contrats pour des chercheurs précaires sur 3 à 5 ans. Il y aurait là une belle possibilité d’accorder paroles et actes (alors que dans l’ombre, aujourd’hui, les labos rament pour ratisser ces nouveaux postes).
Ainsi, si nous nous sentons profondément concernés par le mouvement, nous pensons plus encore qu’il doit élargir ses objectifs.

C’est pourquoi nous appelons les personnels de Jussieu, de toutes catégories, à une réunion de débat :


Vendredi 12 mars, amphi 25B

A 12 h 30